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Nänie, op. 82 de Johannes BRAHMS (1833-1897)

Le Lac des Cygnes (suite)

Piotr Ilitch TCHAÏKOVSKI (1840-1893)

Le premier ballet de Piotr Illitch TCHAÏKOVSKY (1840-1893), Le Lac des Cygnes, composé en 1875-1876, fait partie des plus beaux ouvrages du genre, et de ceux qui figurent le plus souvent à l'affiche. Il est en droit d'être considéré comme le modèle et le sommet insurpassé du ballet d'action classique. Dans le ballet, comme dans l'opéra ou le poème symphonique, Tchaïkovsky reste un psychologue participant sans réserve aux espoirs et aux douleurs de ses personnages. Ceci, joint à la générosité sonore de la partition, fait que Le Lac des Cygnes est le premier ballet russe dont la musique puisse sans dommage s'écouter indépendamment du spectacle.

En 1882, Tchaïkovsky envisagea de réaliser une Suite d'orchestre du Lac des Cygnes. Ce n'est que longtemps après sa mort, en 1900, que son éditeur publia une Suite d'orchestre du Lac des Cygnes, réalisée anonymement, et dont il est impossible de dire si le choix des morceaux est conforme à l'intention initiale de Tchaïkovsky. Elle n'en est pas moins devenue fort populaire. Constituée de six morceaux, elle enchaîne le début du 2ème acte, la Valse en la bémol de l'acte I, deux scènes de l'acte II qui sont la danse des petits cygnes et la seconde danse de la Reine des Cygnes, la danse hongroise de l'acte III et le finale de l'acte II.

Cheruvimskaja Pesn', Svjat, Tebe Poem (Liturgie de Saint Jean Chrysostome, op. 41)

Piotr Ilitch TCHAÏKOVSKI (1840-1893)

La Liturgie de Saint Jean Chrysostome est le premier cycle religieux complet d'un compositeur russe écrit à l'intention de l'office orthodoxe. Tchaïkovsky s'y efforce de renouveler l'esthétique du chant religieux en le débarrassant des italianismes et des germanismes qui le dénaturaient. Sans avoir réussi véritablement à créer un style qui eût pu faire école, il a donné là une oeuvre qui porte le cachet bien identifiable de son auteur. Surtout son exemple a eu le mérite d'ouvrir la voie à des compositeurs de la génération suivante tels que Rachmaninov et Gretchaninov, qui devaient porter la musique chorale religieuse à son apogée.

La Liturgie de Saint Jean Chrysostome, écrite pour choeur mixte a cappella, comporte quinze numéros. Les trois d'entre eux que nous exécutons ce soir sont le Chant des Chérubins, le Sanctus et Nous te chantons.Le recueillement mystique du Chant des Chérubins est recréé par une écriture "planante" aux harmonies raffinées, les voix entrant l'une après l'autre dans un mouvement descendant de notes conjointes. La première partie, lente, du chant, est de forme musicale ABA et d'écriture rigoureusement homophonique ; la seconde, énergique, est parcourue de quelques vocalises. Dans le Sanctus, chant jubilatoire, l'écriture se maintient sur des harmonies fondamentales. Ample et paisible, le chant Nous te chantons fait, dans une certaine mesure, pendant avec le Chant des Chérubins.

Soucieux de mettre sa Liturgie à la portée des chorales de paroisses, Tchaïkovsky se maintient, à peu d'exceptions, dans une écriture dépourvue de complexités d'invention et ne cherche pas particulièrement à faire de figuralisme musical. Bien qu'elle se maintienne dans l'expression de sentiments purement humains plus qu'elle ne reflète la recherche d'une adéquation de la musique à la spiritualité orthodoxe, la Liturgie de Tchaïkovsky a survécu aussi bien dans la pratique concertante que, de manière parfois fragmentée, dans celle du culte.

Nänie

Johannes BRAHMS (1833-1897)

Cette oeuvre fut inspirée à Brahms par la mort prématurée du peintre Anselm Feuerbach, fils de Frau Hofrath Henriette Feuerbach à qui cette oeuvre est dédiée. Le choix du texte, emprunté à Schiller, la façon dont il est traité, le ton et le style adoptés par le compositeur, montrent bien que celui-ci a voulu que son hommage soit symbolique et constituât une sorte d'illustration musicale de l'art d'un peintre que l'on considère comme l'un des rénovateurs de l'esprit classique ancien dans un langage moderne.

L'allusion va même plus loin. Feuerbach était mort en avril à Rome ; or, c'est à une institution de la Rome antique que Schiller s'était référé en écrivant ce poème en forme de sonnet où il évoque les noeniae, ces chants de lamentation funèbre que les parents du défunt d'abord, puis plus tard des pleureuses professionnelles exécutaient pendant les funérailles. C'est une ode à la mort dans laquelle celle-ci est représentée suivant la conception antique, comme la soeur jumelle du Sommeil.

Ainsi qu'il l'avait fait dans son Requiem, Brahms traite l'idée de la mort avec douceur et non dans un esprit de terreur. Tendresse mélancolique, suavité, charme, repos, consolation, tels sont les sentiments que suggère cette musique. L'oeuvre est en deux épisodes : une première partie, andante à 6/4 en ré majeur, en style fugué, de caractère paisiblement pastoral ; une seconde partie, sorte d'hymne più sostenuto à 4/4 en fa dièse.

Le Prince Igor (Danses Polovtsiennes)

Alexandre BORODINE (1833-1887)

Les danses polovtsiennes sont un « tube » immortel de la musique russe, souvent joué et enregistré dans la version pour orchestre seul. Une page dans laquelle on trouvera successivement tous les aspects de l'Orient musical : la rêverie sensuelle, la danse frénétique et un état de transe sauvage, libération à peine sublimée d'une violence barbare. Les flûtes et les clarinettes tracent les arabesques de l'introduction, fines et graciles comme les silhouettes des jeunes filles qui entrent en scène. Et c'est le choeur, cette mélodie envoûtante en mode mineur naturel, doublée au hautbois, au cor anglais, soutenue par de douces syncopes des clarinettes et des bassons et par des accords de harpe.

Syncopes encore, mais d'un tout autre aspect, motoriques et pulsionnelles, qui lancent l'allegro vivo de la Danse des hommes (orchestre seul), avec le déroulement d'une phrase tourbillonnante à la clarinette, reprise par segments à la flûte et au piccolo avant de s'étendre aux cordes puis à tout l'orchestre, tandis que resurgit le motif de l'introduction orchestrale des Danses, naguère si doux aux bois et maintenant transformé par le timbre rugueux des trombones. Dans le diminuendo de la coda de cet épisode, un jeu d'oppositions s'établit entre les deux thèmes. Le nouvel allegro avec choeur (Danse générale), dans le ton de ré majeur, est le coeur et en même temps le moment le plus mémorable des Danses, d'un thème dont la montée par piliers, si simple pourtant dans sa structure, avec la syncope du premier temps canalisant l'élan du rythme semble photographier les rebondissements des danseurs, prolongés par le ruissellement chromatique de l'orchestre.

La figure rythmique et le mouvement sont développés à l'orchestre dans la partie centrale, s'ornant bientôt d'une succession de trilles aux flûtes et clarinettes, tandis que Konchak fait admirer à Igor la beauté de ses danseuses et lui recommande d'en choisir une. Reprise symétrique du Choeur, apaisement, et passage à une nouvelle phase du ballet, avec le presto d'une Danse des adolescents, à laquelle se joignent bientôt les hommes. Rythmée par le tambour, elle partage un nouveau thème lancé par un signal de quinte ascendante entre hautbois et clarinette, ce dernier instrument étant décidément l'un des plus sollicités dans ses effets virtuoses. Le passage au tutti ne tarde pas, le choeur servant ici de fond harmonique et chantant en valeurs longues au milieu de ce vertige orchestral. La partie suivante, moderato alla breve, fait revenir le chant des Jeunes Filles du début, qui va donner lieu à un habile contrepoint entre ce thème et celui de la Danse précédente, en une superposition de la mélodie et de l'arabesque.

Tout le volet de la Danse des Adolescents est ensuite repris da capo. Le finale, allegro con spirito (Danse générale avec choeur), est une reprise diversifiée de la Danse des hommes qui avait été le second épisode du ballet. Le choeur, au début, chante une nouvelle fois en notes longues, pratiquement en cantus firmus - autre effet de contraste simultané entre deux dimensions du temps musical -, passe ensuite à une scansion à la noire, à laquelle une partie de l'orchestre fait contretemps, puis revient aux accords d'une mesure de durée chacun, tandis que la fièvre de l'orchestre va en s'intensifiant et conclut sur une gamme par tons montante et ponctuée de quatre accords fracassants alternés entre les voix et l'orchestre.

Notes de programme de concert mises à jour le mercredi 27 octobre 2010 à 14:54